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LE TEMPS

En effet, c’étoient des personnes qui ne pouvoient que plaindre l’infortune de leurs Princes, & que les exhorter à la patience, dans l’espérance qu’après la mort du Roi, les Grands & le Peuple sauroient leur rendre justice, en empêchant que le Trône ne sortît de leur Maison pour passer sous les loix d’une Etrangere, ou plutôt sous la domination d’une Sujette, que toutes sortes de raisons en devoient exclure.

L’espoir étoit foible, mais il falloit s’en contenter faute de mieux. Les Princes qui commençoient à sortir de l’enfance, étoient fort aimés ; ce qui leur donnoit lieu de se flatter que, si le Roi vivoit encore quelques années, ils pourroient avoir le temps de former auprès de lui un parti propre à balancer celui de la Reine, & à le faire rentrer en lui-même.

Cependant, cette Princesse voyant le sien considérable, se trouvant allez forte sans ceux qui y manquoient, dédaigna de les faire périr, ainsi que de les gagner. Mais elle ne crut pas devoir garder la même indifférence à l’égard des Bonzes & des Sacrificateurs. Elle ne pouvoit ignorer de quelle conséquence il étoit pour elle de se les attacher ; puisque le Peuple n’est jamais plus fortement en-