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LE TEMPS

& en plaisirs ; son sommeil même étoit souvent interrompu : enfin, il n’y avoit que la seule ambition qui fût capable de lui déguiser sa brillante misere.

Quant à moi, la plus tendre enfance ne fut pas assez puissante pour me cacher le malheur de sa situation : je frémissois en songeant que les peines qui l’accabloient, étoient une vive représentation de celles que je devois éprouver. J’en gémissois ; mais me croyant attaché à cet esclavage par un devoir dont rien n’étoit capable de me préserver, je m’appliquai de toutes mes forces à me perfectionner dans l’art de régner, &, malgré l’inclination qui me portoit à la Philosophie, ainsi qu’à l’Astrologie, je ne m’en occupois qu’à mes moments de délassements ; mais comme c’étoit un penchant naturel, le peu de temps que j’y employois, me fut extrêmement profitable, & je devins fort savant, sans pour cela négliger davantage ce que je regardois comme essentiel à ma condition.

L’âge de mettre en pratique les leçons que j’avois reçues en entrant dans le monde, étant arrivé, il fallut enfin me charger de cet effroyable fardeau. Je fus d’abord assez heureux ; les factions, dont la Régence avoit été tourmentée, se dissipe-