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LE TEMPS

causé la ruine… Que dites-vous, bonne mere, interrompit Merille, avec émotion ; & de qui donc l’infortunée Merille a-t-elle causé les malheurs ?

De ses freres, mon enfant, reprit la vieille, en répandant quelques larmes ; elle en avoit deux, ils étoient vertueux & dignes du rang où on les a vus naître. Ces chers Princes faisoient toute l’espérance du Royaume ; mais ils en ont été bannis à cause d’elle, & on ne doute point que ce bannissement ne soit un mystere qui nous cache leur mort.

Cette vieille avoit été esclave de la Reine, de la bonté de qui elle tenoit la liberté ; jugeant par le silence de Merille, qu’elle souhaitoit d’en apprendre davantage, elle n’attendit pas qu’elle lui demandât cette histoire, & la lui récita de point en point.

Tandis qu’elle étoit esclave, elle avoit joui de la faveur de sa maîtresse, & s’étoit trouvée par hazard dans un coin de son cabinet, où elle avoit été témoin de la conversation, lorsque le traître Mouba lui ayant proposé la mort des fils du Roi, & n’ayant pu résoudre cette Princesse à une si coupable action, la sollicita si fortement pour que du moins elle les éloignât, qu’elle lui avoit enfin accordé sa demande.