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ET LA PATIENCE.

inconnue ; elle convenoit qu’elle méritoit la mort, & ne se flattoit pas de l’éviter, si cette faute venoit à être découverte. Ne consultant donc que la terreur que lui inspiroit le péril, elle courut sur la Place prochaine, où, s’adressant au premier Porteur qu’elle trouva, elle enleva avec autant de diligence que de facilité, tout ce qui étoit en sa maison, & le transporta dans un quartier fort éloigné, où elle passa la nuit avec de si grandes inquiétudes, que ne pouvant y réfuter, elle attendit à peine que le jour parût pour aller chercher des Marchands, à qui elle vendit tout ce qu’elle possédoit, laissant Angole pour se retirer dans un Pays désert & fort éloigné, & ne pouvant goûter de repos qu’après avoir mis un espace considérable entre elle & la Ville qu’elle venoit de quitter.

La peur dont elle étoit saisie, lui fit prendre des peines bien inutiles, car sa bassesse la rendoit si inconnue dans Angole, que l’on ne s’étoit point apperçu qu’elle y eût été, & que l’on ne s’apperçut pas davantage qu’elle en fût absente. Personne n’avoit vu entrer Merille chez elle ; de plus, elle n’avoit rien à redouter de son indiscrétion, puisque cette jeune Princesse eût été incapable de la trahir quand elle n’auroit pas pris le parti que son désespoir lui