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LE TEMPS

dre plus que Mouba n’osoit espérer ; & toujours attentive à se mettre à portée d’écouter, elle ne perdit pas un mot d’une conversation secrete & très-importante que la Reine & sa prétendue fille eurent ensemble, par où elle apprit que la fausse Merille n’étoit pas ce qu’elle paroissoit, mais le véritable Zerbeke, que l’on disoit avoir quitté le Palais long-temps devant le départ de son beau-pere.

Cette découverte frappa Mouba de différents mouvements ; la joie de trouver un moyen certain de perdre la Reine, Zerbeke, & celui qui lui servoit de pere, étoit balancée par la terreur des conséquences d’une conspiration, qu’il ne doutoit presque pas que l’absence qu’avoit faite cet Officier, ne dût faire réussir, s’il n’étoit prévenu. Une autre raison, qui ne lui parut pas moins importante, lui causoit une vive douleur ; c’étoit la perte de les espérances, & l’intérêt d’un amour qui n’avoit déjà pris que trop d’empire sur son cœur.

Celui qu’il avoit senti pour Zerbeke, cru Merille, ne tarda pas à se changer en une haine cruelle ; mais si cet amour cessa pour lui, à la connoissance de son sexe & de ses desseins, il se conserva aussi vif pour la Princesse qu’il avoit représentée : cette