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LE TEMPS

Je suis plus allarmé pour sa vie que pour sa fidélité, Madame, reprit ce jeune homme, il n’y a que la mort ou l’esclavage qui puisse le détourner de ce qu’il vous doit ; & je crois que, sans compter davantage sur des secours qu’il ne peut apparemment vous donner, vous devez songer vous-même à vous secourir.

Que pouvons-nous faire, repartit la Reine ? nous sommes prisonnieres. Sans trésors & sans amis, n’ayant ni crédit ni autorité, en cet état affreux tout nous est impossible. Pardonnez-moi, grande Reine, répliqua vivement le jeune homme ; je puis, d’un seul coup, détruire la tyrannie, & vous rendre, avec la liberté, une Couronne qui n’appartient qu’à vous. Je plongerai ce fer, ajouta-t-il fiérement en montrant son poignard, dans le sein du perfide : ne doutez pas qu’après sa mort, le Peuple qu’il a séduit, rentrant dans son devoir, ne vienne, par un juste repentir, reconnoître à vos pieds son crime & votre puissance légitime.

Mouba a trop de créatures, de qui les coupables actions, enchaînées aux siennes, rendent leur intérêt commun, interrompit la Reine ; & quoiqu’ils n’eussent pu le préserver du châtiment qu’il mérite, ils le vengeroient pour éviter d’en su-