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ET LA PATIENCE.

pieds, si vous daignez me conserver la vie, je tâcherai de mériter cette faveur, & de vous rendre tous les services qui seront en mon pouvoir. C’est bien fait, reprit-il, moyennant cela tu ne seras pas malheureuse, puisque tu seras à discrétion de la nourriture, & des trésors dont ce Palais est rempli ; de plus, je te ferai l’honneur de m’entretenir quelquefois avec toi. Je ne fus pas fort flattée de cette promesse ; mais, malgré l’horreur que me donnoit mon nouveau Maître, elle m’inspira le courage de parler pour la déplorable Zelima ; & m’humiliant de nouveau : Seigneur, lui dis-je, je ferai mon possible pour me rendre digne des graces que vous me promettez ; mais oserai-je vous supplier de m’en accorder une autre ? C’est, continuai-je, de rendre à ma misérable fille la forme dont vous la venez de priver : si vous daignez nous faire cette faveur, elle & moi en aurons une si vive reconnoissance, qu’elle redoublera notre zele, & que vous serez plus agréablement servi, puisqu’elle suppléera à ma foiblesse.

Il n’est plus temps, me dit-il : si tu m’avois parlé plutôt, je te l’aurois laissée volontiers ; &, pour l’amour de toi, je me serois contenté de la sucer ; par ce moyen,