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LE TEMPS

temps de s’informer des moyens de détruire l’enchantement, sans quoi c’étoit ne rien faire pour les Princes, & pour tant de malheureux qui gémissoient sous cette figure étrangere.

Elle n’avoit pas encore trouvé l’occasion de s’en instruire, & n’osoit la chercher ; mais le péril pressant la détermina à en courir le risque, & à redoubler son attention pour profiter de tout ce qu’elle entendroit dire au monstre. Elle la rencontra heureusement ; & quoiqu’il fût extrêmement défiant, lui-même la lui fournit dès le même soir, où, étant de meilleure humeur que de coutume, il l’appella pour l’entretenir.

Il lui fit plusieurs questions, lui demandant entre autres, en quel état étoit Merille, & si elle croyoit que cette jeune fille durât encore long-temps. L’Esclave lui dit qu’elle étoit fort délicate, que, si elle n’en avoit pas un soin extrême, elle seroit bientôt morte. Tant pis, s’écria le glouton, je n’ai jamais rien goûté de si bon : garde-toi, ajouta-t-il, de la faire travailler ; car cela pourroit avancer sa fin.

Cependant, mon redoutable Seigneur, reprit la vieille, je ne puis me passer de secours, n’ayant pas assez de forces pour faire seule ce qui concerne votre service ;