Page:Villetard - Histoire de l’Internationale.djvu/348

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rendaient impossible la continuation de la guerre, et que, pour sanctionner la paix imposée par Bismark, les plus mauvais des Français valaient autant que les meilleurs. Mais, non coulent de ces précautions, Thiers, même avant que le secret de l’armistice fût connu à Paris, partit pour faire un tour électoral dans les provinces, afin de ressusciter le parti légitimiste qui, avec les orléanistes, devait prendre la place des bonapartistes, désormais impossibles. Il ne le craignait pas. Impossible comme gouvernement de la France moderne, et par-là, méprisable comme rival, quel parti pouvait être plus utilement élu comme instrument de contre-révolution, que celui dont l’action, d’après Thiers lui-même (Chambre des députés, 5 janvier 1833) « avait toujours été limitée aux trois ressources de l’invasion étrangère, de la guerre civile et de l’anarchie ? » Les légitimistes croyaient de bonne foi à l’avènement de leur millénaire, si longtemps attendu. L’étranger foulait le sol de la France ; l’empire était tombé ; Bonaparte était prisonnier ; et ils étaient eux-mêmes debout. La roue de l’histoire avait évidemment tourné en arrière pour s’arrêter à la Chambre introuvable de 1816. Dans les Assemblées de la République (de 1848 à 1851), ils avaient été représentés par leurs champions littéraires et parlementaires ; c’était le commun du parti qui se présentait cette fois, — tous les Pourceaugnacs de la France.

Aussitôt que cette Assemblée de ruraux se fut réunie à Bordeaux, Thiers leur fit comprendre qu’il fallait consentir aux préliminaires de paix tout de suite, sans même leur faire l’honneur d’un débat parlementaire, parce que c’était à cette seule condition que la Prusse leur permettrait de commencer la guerre contre la République et contre Paris, qui en était la forteresse. En effet, la contre-révolution n’avait pas de temps à perdre. Le second empire avait plus que doublé la dette nationale, et avait chargé toutes les grandes villes de dettes