Page:Villetard - Histoire de l’Internationale.djvu/383

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mistes, les orléanistes et les bonapartistes, pris ensemble, ne montaient pas à huit mille. Les élections supplémentaires qui suivirent furent encore plus hostiles. Ainsi, au lieu d’obtenir des provinces la force matérielle tant désirée, l’Assemblée nationale perdit son dernier vestige de force morale, en cessant de paraître l’expression du suffrage universel du pays. Pour achever sa déconfiture, les conseils municipaux nouvellement élus dans toutes les villes de France menaçaient ouvertement l’Assemblée usurpatrice de Versailles d’ouvrir une autre Assemblée à Bordeaux.

Alors le moment de l’action décisive, si longtemps attendu par Bismark, était arrivé. Il somma péremptoirement Thiers d’envoyer à Francfort des plénipotentiaires pour la conclusion définitive de la paix. En toute obéissance à l’appel de son maître, Thiers s’empressa d’y envoyer son fidèle Jules Favre, appuyé de Pouyer Quertier. Ce Pouyer Quertier, filateur de Rouen, fervent et même servile partisan du second empire, n’avait jamais rien trouvé à critiquer dans sa politique, excepté son traité de commerce avec l’Angleterre, qui lésait ses intérêts de boutique. À peine installé à Bordeaux comme ministre des finances sous Thiers, il dénonça ce traité inique, qui devait être bientôt abrogé, et eut même l’effronterie de vouloir (mais en vain, car il avait compté sans Bismark) relever immédiatement les vieux droits protecteurs contre l’Alsace, vu qu’aucun traité ne s’y opposait. Cet homme, qui regardait la contre-révolution comme un moyen de faire baisser les salaires à Rouen, et la cession de provinces françaises comme un moyen d’augmenter le prix de ses marchandises en France, n’était-il pas l’homme prédestiné au choix de Thiers, comme collègue de Jules Favre, dans le dernier acte de sa trahison ?

Dès que ce beau couple de plénipotentiaires arriva à Francfort, le matamore Bismark leur posa de suite cette