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Page:Villetard - Le Japon, 1879.djvu/128

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LE JAPON.

première classe au-dessous de la noblesse, et que la bourgeoisie des villes, c’est-à-dire la classe des marchands et des industriels, était presque au bas de l’échelle sociale, n’ayant guère au-dessous d’elle que les étas, parias du Japon, relégués au dernier rang parce que les métiers qu’ils exerçaient leur infligeaient, d’après les croyances religieuses du pays, une souillure indélébile. À côté des étas se plaçaient les christans, c’est-à-dire les chrétiens, ou pour parler plus exactement, les descendants des Japonais convertis jadis par saint François Xavier, par ses compagnons et par ses disciples. Depuis les persécutions ordonnées par Iyeyas et ses successeurs, ces familles auxquelles on n’a jamais pardonné de s’être attachées un instant, il y a plus de deux siècles, au culte apporté par les étrangers, sont encore tenues pour suspectes et on ne leur permet même pas de rendre librement à leurs morts les derniers devoirs, de crainte que quelques cérémonies de la religion proscrite ne viennent se glisser dans les honneurs qu’elles leur rendraient. Quand on voit persister si longtemps le massacre de ces malheureux qu’on avait déclarés les derniers chrétiens japonais, les persécutions contre leurs descendants, on a lieu de supposer que le christianisme avait jeté au Japon des racines plus profondes que ne l’assure le gouvernement, et l’on se dit que les shogouns avaient sans doute des raisons très graves pour craindre un nouveau réveil de la religion contre laquelle le grand Taïko Sama lui-même s’était reconnu impuissant.

La féodalité avait eu pour conséquences naturelles, en Europe, la création d’une foule innombrable d’associations, formées par les petits qui se liguaient entre eux pour être en état de défendre leurs intérêts contre la puissance formidable des princes et des seigneurs. La même cause a produit les mêmes effets dans l’extrême Orient. Rien ne nous rappelle plus complètement notre moyen âge que ce que nous lisons sur les corporations dans lesquelles sont engagés