Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/353

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des chevelures, des cymbales d’or, des voiles, des blancheurs éparses scintillent ; ce sont les musiciennes entrelacées, qui n’ont pas jeté de plaintes.

Aux pieds des lits de pourpre, contre le gland des coussins, sur les tapis, des pierreries brûlent, isolées.

Et là-bas, perdu sous les profondeurs des colonnades, un lynx, ayant au cou le tronçon de sa chaîne, hurle, vacillant, sur les épaules d’une statue. — Il tombe ; sa chute résonne un moment, puis s’étouffe… C’est le dernier bruit.

Tout s’ensevelit dans la solennité des noirs silences, dans le sommeil sans rêves.

Sous l’ombre d’Azraël, la Salle est devenue immémoriale.

Seuls, aux trois angles, sous les lampes d’argile consacrées au Nom, les sphynx d’Égypte ont soulevé lentement leurs paupières et, faisant évoluer leurs prunelles de granit, glissent vers le Messager leur regard éternel.



Ainsi qu’un foudre radieux qui a traversé des torrents de vapeurs fumantes, ce soir, moulant sur l’épaisseur de nos airs mortels sa forme nébuleuse, le fatal Chëroub est là, debout, sur cette terrasse du palais de Salomon.

Impénétrable à des yeux d’argile, la face du Messager ne peut être perçue que par l’esprit. Les créa-