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Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/153

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intérieur est redevenu clair et pur. Hadaly prend alors une grande coupe d’eau limpide et les quelques pastilles en question, ― et la voilà vivante comme vous et moi, prête à obéir à toutes ses bagues et à toutes ses perles, comme nous cédons à tous nos désirs.

― Comment ! elle souffle, entre ses lèvres, des flocons de vapeur ? demanda lord Ewald.

― Ainsi que nous le faisons nous-mêmes, continuellement, ― répondit Edison en montrant les cigares allumés qu’ils tenaient. ― Seulement, elle ne garde en sa bouche aucun atome de poussière métallique ni de fumée. Le fluide consume et dissipe tout en un moment. ― Elle a son narguilhé, d’ailleurs, si vous tenez à justifier…

― J’ai remarqué un poignard à sa ceinture ?

― C’est une arme dont nul ne saurait parer un seul coup et chaque coup est mortel. Hadaly s’en sert pour se défendre, si, pendant un éloignement de son seigneur, quelque visiteur tentait d’abuser de son apparent sommeil. Elle ne pardonne pas la plus légère offense ; elle ne reconnaît que son élu.

― Elle ne voit pas, cependant ? dit lord Ewald.

― Bah ! Qui sait ? répondit Edison. Y voyons-nous donc si bien nous-mêmes… En tout cas, elle devine ou le prouve, du moins. ― Hadaly est, je vous le dis encore, une enfant un peu sombre, qui, insoucieuse de la mort, la donne facilement.

― Ainsi, le premier venu ne pourrait lui enlever cette arme ?

― Ceci, répondit en riant Edison, j’en défierais non seulement tous les hercules du globe, mais toute la faune des airs, de la terre et des mers.