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Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/244

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Voyez : l’Idole a des pieds d’argent, comme une belle nuit. Leur maniérisme n’attend que le derme neigeux, le repoussé des malléoles, les ongles rosés et les veines de ceux, n’est-ce pas ? de votre belle chanteuse. Seulement, s’ils semblent légers en leur démarche, ils le sont moins en réalité. Leur plénitude intérieure est réalisée par la lourde fluidité du vif-argent. Cet hermétique maillot de platine, qui les continue, est rempli du liquide métal et monte, en s’étrécissant, jusqu’à la naissance du mollet, de sorte que toute la pesanteur porte sur le pied même. Bref, ce sont deux petits brodequins de cinquante livres et d’une mutinerie, cependant, presque enfantine. Ils paraissent d’une légèreté d’oiseau, tant le puissant électro-aimant qui les inspire et qui anime le mouvement crural se joue de ces deux perfections futures.

L’armure est séparée à la taille, que ce voile noir enveloppait tout à l’heure, par cette ligne ployante, composée d’une quantité de très courts et très fins liserons d’acier, qui relient, sous les flancs, le système crural à la taille même et à l’extrémité de l’abdomen. Cette ceinture, comme vous le voyez, n’est pas, circulaire : elle est d’un ovale incliné en avant, comme la ligne inférieure d’un corset prolongée jusqu’à la pointe.

Ceci donne à la taille de l’Andréïde (recouverte de sa chair à la fois résistante et flexible) ce plié gracieux, cette ondulation ferme, ce vague dans la démarche, qui sont si séduisants chez une simple femme. Remarquez bien qu’ils sont convexes à la taille et concaves en avant du corps, ce qui, grâce à la tension de ces archals, autour