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ton être, tu redeviendras, dans l’Intemporel, — esprit purifié, distincte essence en l’Esprit Absolu, — le consort même de ce que tu appelles Déité.

Axël, à lui-même, sans parler

Je suis un roi pauvre. Si la splendeur du paternel trésor m’était dévoilée, je pourrais choisir en liberté : — mais quoi ! je n’ai même pas le mérite du sacrifice : le Destin me force à vivre de rêves.

Maître Janus, qui a lu dans la pensée d’Axel

Et de quoi voudrais-tu vivre ? — De quoi vivent les vivants, sinon de mirages, — d’espoirs vils, toujours déçus ? Est-ce donc celui qui peut choisir qui est libre ? Non, celui-là seul est libre qui, ayant pour jamais opté, c’est-à-dire ne pouvant plus faillir, n’est plus contraint d’hésiter. — La liberté n’est, en vérité, que la délivrance. Se plaindre de l’absence du danger, c’est constater la possibilité d’un esclavage : c’est donc appeler la tentation : — daigner cela, c’est déjà succomber. Tu viens d’avoir une pensée terrestre.

Axël, brusquement

Et quand je serais homme, un instant ? La terre est belle ! Mes jeunes veines roulent un sang de