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Sœur Aloyse, grave

Oui, ma mère.

L’Abbesse

Je la confie à votre dilection. Vous veillerez et prierez avec elle, dans l’oratoire, jusqu’à l’avant-quart de minuit.

L’Abbesse remonte vers le soubassement de la chaire où se tient l’Archidiacre. Le prêtre parcourt, maintenant, des parchemins et des papiers, auprès d’une lampe que vient de poser, sur l’un des bras d’une stalle, sœur Laudation.
Sœur Aloyse, à part, s’approchant de Sara

Mon Dieu ! Joignant les mains sur l’épaule de Sara, et d’une voix très basse, presque indistincte : Sara, souviens-toi de nos roses, dans l’allée des sépultures ! Tu m’es apparue comme une sœur inespérée. Après Dieu, c’est toi. Si tu veux que je meure, je mourrai. Rappelle-toi mon front appuyé sur tes mains pâles, le soir, au tomber du soleil. Je suis inconsolable de t’avoir vue. Hélas ! tu es la bien-aimée !… J’ai la mélancolie de toi. Je n’ai de force que vers toi. Un silence. Cède ; deviens comme nous, sous un voile ! Partage l’épreuve d’un instant. Tu sais bien que nous ne pouvons pas vivre ! — Si vite nous serions ensemble, au même