Page:Villiers de L’Isle-Adam - Axël, 1890.djvu/306

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rêves sur ton sol ingrat : je ne porterai pas de flambeau, je ne frapperai pas d’ennemis.

Puisse la race humaine, désabusée de ses vaines chimères, de ses vains désespoirs, et de tous les mensonges qui éblouissent les yeux faits pour s’éteindre — ne consentant plus au jeu de cette morne énigme, — oui, puisse-t-elle finir, en s’enfuyant indifférente, à notre exemple, sans t’adresser même un adieu.

Sara, toute étincelante de diamants, inclinant la tête sur l’épaule d’Axël et comme perdue en un ravissement mystérieux

Maintenant, puisque l’infini seul n’est pas un mensonge, enlevons-nous, oublieux des autres paroles humaines, en notre même Infini !

Axël porte à ses lèvres la coupe mortelle, — boit, — tressaille et chancelle ; Sara prend la coupe, achève de boire le reste du poison. — puis ferme les yeux. — Axël tombe ; Sara s’incline vers lui, frémit, et les voici gisant, entrelacés, sur le sable de l’allée funéraire, échangeant sur leurs lèvres le souffle suprême.
Puis, ils demeurent immobiles, inanimés.
À présent, le soleil jaunit les marbres, les statues ; le grésillement de la lampe et du flambeau se résout en fumée dans le rais lumineux qui flue obliquement du soupirail. — Une pièce d’or tombe, roule et sonne comme l’heure contre un sépulcre. — Et — troublant le silence du lieu terrible où deux êtres humains