Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa redingote, un tablier de serge pareil à celui de Dom Pitra. Il écossait tout bonnement des pois, avec son entourage — qui se livrait à ce même labeur.

Je m’adressai à l’un des Pères qui, une bêche à la main, retournait la terre :

— On fait l’honneur à ce pèlerin, là-bas, de le traiter en frère convers ? lui dis-je.

— C’est que ce monsieur, c’est Louis Veuillot, me répondit-il.

Quelques moments après, l’Abbé de Solesmes nous présentait l’un à l’autre.

— Je ne m’étonne plus du ton de vos paroles, monsieur, lui dis-je ; je les ai trouvées simples et fortes comme vos écrits.

Ce disant, je pris place dans le cercle où l’on écossait des pois. J’en avisai moi-même quelques-uns, dans mon zèle, — voulant me rendre utile — et surtout ne point demeurer oisif devant l’exemple.

— Lorsque vous êtes survenu, monsieur, me répondit Louis Veuillot, le révérend père Abbé me reprochait justement la rudesse de mes écrits.

Ah ! c’est que je m’adresse à de prétendus athées qui, en flétrissant leurs âmes, sont jaloux de détruire la foi des esprits mal assurés qui les entendent. Un exemple : nous savons qu’il est plus facile, aux professeurs d’incrédulité, de périr sur une barricade que de faire maigre le vendredi. (Les autres jours, passe encore ! mais l’Église, sachant ce qu’elle prescrit et rien n’étant plus diffi-