Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/184

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vitraux ; nous connaissons votre lampe. Les rues se font désertes, l’épée se brise dans l’embuscade : c’est le noir danger qui guette, avec nos yeux, dans la solitude endormie. Femme, tu deviens téméraire, toi si prudente, si profonde et si sage toujours. Retourne ! et c’est un conseil de vieillard ; nous nous intéressons à toi.

Elle marchait et s’avançait, tranquille, au milieu des ruelles, dans les faubourgs équivoques et ténébreux.

Ah ! c’est qu’elle éprouvait parfois le grand vertige d’elle-même ; elle le sentait bien : ce qui lui restait d’humain pouvait la quitter à chaque instant ; elle ne tenait presque plus à la terre, et elle n’existait pas en vérité. Or il fallait qu’elle se souvînt de son corps, puisqu’elle avait dit :

« J’attendrai. »

C’est pourquoi, par une réaction nécessaire, elle venait se retremper dans le spectacle de quelques souffrances, pour ne pas oublier qu’elle existait. Le costume lui avait paru plus commode masculin que féminin dans cette circonstance, motif qui l’avait déterminée à le choisir.