Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/225

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vision qu’il conçoit, avec l’idéal qu’il nomme de mon nom ! Il faut donc que je veille pour déformer, par des transitions obscures, cette vision jusqu’à la réalité. Il faut que son idéal soit agrandi par un ensemble de réflexions nouvelles pour se trouver au point de vue où je suis. Alors il lui sera donné de voir celle qui l’attire.

Si j’avais eu du temps à perdre, j’eusse presque regretté de ne pouvoir aimer.

N’est-ce rien, d’ailleurs, que de préserver le plus longtemps possible cette belle vie, toute jeune, des ennuis amoindrissants ? N’est-ce rien que de considérer la plus noble chose de ce monde s’émouvoir, admirer, s’étonner, rêver, palpiter pour une image, pour un enchantement, pour une chose qui brille et qui ravit ceux qui ne voient pas encore ? C’est dit. Je m’efforcerai de vivre un instant.

Pardonnez, ô vous qui ne daignez pas vivre, si j’ose faire d’avance en lui la preuve de la mission que je me suis assignée. Qu’ai-je à préférer si ce n’est de rendre cet enfant le plus idéalement satisfait de tous ceux qui sont et seront sur ce grain de boue éteinte ? À lui, donc, sceptres, hochets et cou-