Page:Villiers de L’Isle-Adam - Le Nouveau-Monde, 1880.djvu/50

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tous ceux que la fortune a trahis sur le vieux continent ; tous ceux auxquels il reste le courage de réussir ou de périr, et ceux qui veulent aimer et vivre en liberté. Là, si l’on aborde cinquante, l’année d’après on est dix mille. Nous sommes les aventuriers des forêts sublimes, les familiers des hautes montagnes, les cavaliers des déserts et des prairies ! Nous naviguons sur des fleuves grands comme des océans, — et nos amis, les colons anglais, creusent des mines resplendissantes comme un conte arabe ! — Soldats épris de contrées inconnues, nous disputons aux indigènes leurs chasses et leurs territoires, un contre mille, et nous restons victorieux. Chacun de nos villages, chacune de nos cités est notre œuvre et notre conquête. — Ainsi, formé de toutes les nations du monde, nous constituons un peuple intrépide, fier de ses combats et sur de l’Avenir.

MARY, frappant des mains. naïve Oh ! c’est tout de poésie ! Ruth a écouté. Une espérance lui est revenue ; pendant le mot de Mary, elle s’est levée.

RUTH, s’approchant, grave Monsieur de Vaudreuil, je m’appelle Ruth Moore ; je suis la seule parente de miss Mary Mark Ellis ; et son père, l’un des plus vaillants officiers highlanders du Royaume-Uni, l’a léguée à ma tutelle.

MARY, l’interrompant, joyeuse, pendant que le chevalier s’incline devant Ruth Comment ! tu étais-là ?

Ruth, continuant Vous vous aimez, je le vois, je le sais.

Oui, Miss Ruth. Quelques jours m’ont suffi pour l’aimer à tout jamais, et j’ai l’ordre du Roi de m’exiler, — lorsque je donnerais le Nouveau-Monde lui-même pour qu’elle devînt ma femme !