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L’INAUGURATION DE LA MAISON.

series de Flandre ou des Gobelins, non plus que des cuirs de Cordoue. Ces sortes de tentures coûtaient fort cher, tandis que les toiles peintes ne coûtent pas beaucoup plus que du papier de tenture et moins que des étoffes meublantes, la perse exceptée. Mais on ne peut guère tendre un salon, une salle à manger avec de la perse ; cela n’est pas assez solide à l’œil ; c’est bon pour une chambre à coucher. Il faut, dans les grandes pièces, des tentures qui aient un aspect velouté, chaud, solide.

— Et ces toiles peintes sont solides ?

— D’aspect, oui, et aussi en réalité ; la preuve est que vous pourrez en voir à Reims, qui datent du quinzième siècle et qui sont d’une parfaite conservation ?

— Mais comment s’y prend-on pour faire ces tentures ?

— On choisit des toiles canevas, ou treillis ou croisées, à gros grains, faites exprès, assez semblables aux toiles avec lesquelles on fabrique les sacs. On tend ces toiles sur un plancher, avec des pointes ; on les encolle, c’est-à-dire qu’on passe dessus une couche de colle de peau avec un peu de blanc d’Espagne. Puis quand cet encollage est sec, on procède à la détrempe comme pour la décoration de théâtre. On peut ainsi peindre tout ce que l’on veut, des semis, comme nous avons fait ici, cela ne coûte pas gros, puisqu’on se sert de pochoirs ; ou des ornements, des paysages, des fleurs, des figures même. Le prix de la matière est peu de chose, et le plus ou moins de valeur de ces tentures dépend du travail de l’artiste. Quand cela est sec, on roule les toiles et on les envoie partout sans grands frais ; puis, sur place, on les retend sur des châssis très-minces, ce que nous appelons des porte-tapisseries. Il y a donc isolement entre le mur et la tenture, ce qui est nécessaire à la campagne où les papiers collés se gâtent toujours ; d’autant que, si on ne chante pas les pièces en hiver et que l’on craigne l’humidité, on détend les toiles, on