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de la nef. À Autun, cette première travée est doublée d’une seconde, puis vient l’abside principale simple, sans bas côtés, flanquée de deux petites absides comme les églises du Rhin. À Langres, après la première travée du chœur, c’est une série de colonnes posées en hémicycle, portant les voûtes d’arêtes à nervures du collatéral. Ces voûtes sont naïvement tracées ; car chaque travée rayonnante du collatéral formant coin, et les arcs-ogives donnant en projection horizontale des lignes droites, il s’ensuit que les rencontres des diagonales ou les clefs sont bien plus rapprochées du sanctuaire que du mur extérieur ; les naissances des archivoltes bandées d’une colonne à l’autre étant au même niveau que les naissances des formerets tracés sur les murs du pourtour, et les arcs formerets comme les archivoltes étant des tiers-points, les clefs de ces formerets sont plus élevées que les clefs des archivoltes, et par conséquent les lignes de clefs des voûtes sont fortement inclinées (voy. Voûte). Les archivoltes de la première travée du chœur donnant la hauteur du triforium percé dans le mur d’adossement du comble, il reste dans la partie circulaire, entre la base de ce triforium et les archivoltes bandées sur les colonnes, un espace plus grand. Il y a donc changement de système complet entre les parties parallèles du chœur et le rond-point, ce sont pour ainsi dire deux édifices qui sont accolés l’un à l’autre, et se relient mal. Les grandes voûtes rendent encore cette discordance plus sensible, car la première travée est fermée par une voûte en arcs d’ogive, et le rond-point par un cul-de-four engendré par le dernier arc-doubleau ogival ; et fait remarquable, cette voûte en cul-de-four est maintenue par des arcs-boutants qui datent de sa construction. À la naissance du cul-de-four s’ouvraient de petites fenêtres plein cintre dont les archivoltes venaient le pénétrer, tandis que sous les formerets de la première travée les fenêtres pouvaient être hautes et percées dans les murs goutterots. Le système de la construction ogivale franchement adopté dans tout le reste de l’édifice déjà, se trouvait ainsi complétement étranger au rond-point qui restait roman, au moins dans sa partie supérieure. Un défaut d’harmonie aussi choquant ne pouvait manquer de faire faire aux constructeurs de nouveaux efforts pour appliquer aux ronds-point, comme à tout le reste des édifices, le mode de voûter en arcs d’ogive. Comme ornementation, la cathédrale de Langres reste également romane, le triforium s’ouvre dans les combles couvrant les bas côtés ; les piles sont composées de pilastres cannelés, comme à Autun, à Beaune, à Cluny, à la Charité-sur-Loire, conformément à la tradition antique ; les contre-forts du chœur sont plaqués de gros pilastres cannelés, terminés par des chapiteaux corinthiens, les chapiteaux des colonnes du chœur sont des imitations de chapiteaux romains[1]. La partie antérieure de la nef elle-même, élevée de 1180 à 1190, laisse voir des chapiteaux à crochets, quoique les piles restent composées de pilastres cannelés comme dans le chœur et le transsept. Sur

  1. Langres est une ville romaine ; on y voit encore une porte antique décorée de pilastres cannelés.