Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 1.djvu/363

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[arc]
— 344 —

darrière pour recevoir les coups que les Sarrazins gettoient à engis ; dont ils avoient seize tout droiz, dont ils faisoient merveilles[1]. » L’assaillant appuyait ses beffrois et chats par des batteries de machines de jet, trébuchets (tribuquiaux), mangonnaux (mangoniaux), calabres, pierriers, et par des arbalétriers protégés par des boulevards ou palis terrassés de claies et de terre, ou encore par des tranchées, des fascines et mantelets. Ces divers engins (trébuchets, calabres, mangonnaux et pierriers) étaient mus par des contre-poids, et possédaient une grande justesse de tir[2] ; ils ne pouvaient toutefois que détruire les créneaux et empêcher l’assiégeant de se maintenir sur les murailles ou démonter leurs machines.

  1. Le sire de Joinville, Hist. du roi saint Louys, édit. 1668. Du Cange, p. 37, Dans ses observations, p. 69, Du Cange explique ainsi ce passage : « Le roy saint Louys fit donc faire deux beffrois, ou tours de bois pour garder ceux qui travailloient à la chaussée : et ces beffrois étoient appellés chats-chateils, c’est-à-dire cati castellati, parce qu’au dessus de ces chats, il y avoit des espèces de châteaux. Car ce n’étoit pas de simples galeries, telles qu’estoient les chats, mais des galeries qui étoient défendues par des tours et des beffrois. Saint Louys en l’épistre de sa prise, parlant de cette chaussée : Saraceni autem è contra totis resistentes conatibus machinis nostris quas erexeramus, ibidem machinas opposuerunt quamplures, quibus castela nostra lignea, quæ super passum collocari feceramus eumdem, cunquassata lapidibus et confracta cumbusserunt totaliter igne græco Et je crois que l’étage inférieur de ces tours (chateils) estoit à usage de chats et galeries, à cause de quoy les chats de cette sorte estoient appellés chas chatels, c’est-à-dire comme je viens de le remarquer, chats fortifiés de châteaux. L’auteur qui a décrit le siége qui fut mis devant Zara par les Vénitiens en l’an 1346, lib. II, c. VI apud Joan. Lucium de regno Dalmat., nous représente ainsi cette espèce de chat : aliud erat hoc ingenium, unus cattus ligneus satis debilis erat confectionis, quem machinæ jadræ sæpius jactando penetrabant, in quo erat constructa quædam eminens turris duorum propugnaculorum. Ipsam duæ maximæ carrucæ supportabant. Et parce que ces machines n’estoient pas de simples chats, elles furent nommées chats-faux, qui avoient figure de beffrois et de tours, et néanmoins estoient à usage de chats. Et c’est ainsi que l’on doit entendre ce passage de Froissard. Le lendemain vindrent deux maistres engigneurs au duc de Normandie, qui dirent que s’on leur vouloit livrer du bois et ouvriers, ils feroient quatre chaffaux (quelques exemplaires ont chats) que l’on meneroit aus murs du chastel, et seroient si hauts qu’ils surmonteroient les murs. D’où vient le mot d’Eschaffaux, parmi nous, pour signifier un plancher haut élevé. » Voy. le Recueil de Bourgogne, de M. Perard, p. 395.
  2. Voy. Études sur le passé et l’avenir de l’artillerie, par le prince Louis-Napoléon Bonaparte, présid. de la Républ., t. II. Cet ouvrage, plein de recherches savantes, est certainement le plus complet de tous ceux qui s’occupent de l’artillerie ancienne ; voici la description que donne du trébuchet l’illustre auteur : « Il consistait en une poutre appelée verge ou flèche, tournant autour d’un axe horizontal porté sur des montants. À l’une des extrémités de la verge on fixait un contre-poids, et à l’autre une fronde qui contenait le projectile. Pour bander la machine, c’est-à-dire pour abaisser la verge, on se servait d’un treuil. La fronde était la partie la plus importante de la machine, et d’après les expériences et les calculs que le colonel Dufour a insérés dans