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et d’autels recouverts de lames de cuivre émaillé ou d’argent doré. Avant la révolution de 1792, il existait encore en France une grande quantité de ces objets (voy. Tombeau) qui ont tous disparu aujourd’hui. Sur les dossiers des stalles de cette même église de Saint-Denis, qui dataient du XIIIe siècle, on voyait encore du temps de D. Doublet, au commencement du XVIIe siècle, des applications de cuirs couverts d’ornements dorés et peints. Les portes principales de la façade étaient revêtues d’applications de lames de cuivre émaillées et d’ornements de bronze doré (D. Doublet, t. 1, p. 240 et suiv. Paris, 1625).

Nos monuments du moyen âge ont été complètement dénaturés dans le dernier siècle, et radicalement dévastés en 1793 ; nous ne voyons plus aujourd’hui que leurs murs dépouillés, heureux encore quand nous ne leur reprochons pas cette nudité. Le badigeon et la poussière ont remplacé les peintures ; des scellements arrachés, des coups de marteau sont les seules traces indiquant les revêtements de métal qui ornaient les tombes, les clôtures, les autels. Quant aux matières moins précieuses et qui ne pouvaient tenter la cupidité des réformateurs, on en rencontre d’assez nombreux fragments. Parmi les applications le plus fréquemment employées depuis le XIIe siècle jusqu’à la renaissance, on peut citer le verre, la terre cuite vernissée et les pâtes gaufrées. Les marbres étaient rares dans le nord de la France pendant le moyen âge, et souvent des verres colorés remplaçaient cette matière ; on les employait alors comme fond des bas-reliefs, des arcatures, des tombeaux, des autels, des retables ; ils décoraient aussi les intérieurs des palais. La Sainte-Chapelle de Paris nous a laissé un exemple complet de ce genre d’applications. L’arcature qui forme tout le soubassement intérieur de cette chapelle contient des sujets représentant des martyrs ; les fonds d’une partie de ces peintures sont remplis de verres bleus appliqués sur des feuilles d’argent et rehaussés à l’extérieur par des ornements très-fins dorés. Ces verres d’un ton vigoureux, rendus chatoyants par la présence de l’argent sous-apposé, et semés d’or à leur surface, jouent l’émail. Toutes les parties évidées de l’arcature, les fonds des anges sculptés et dorés qui tiennent des couronnes ou des encensoirs sont également appliqués de verres bleus ou couleur écaille, rehaussés de feuillages ou de treillis d’or. On ne peut concevoir une décoration d’un aspect plus riche, quoique les moyens d’exécution ne soient ni dispendieux ni difficiles. Quelquefois aussi ce sont des verres blancs appliqués sur de délicates peintures auxquelles ils donnent l’éclat d’un bijou émaillé. Il existe encore à Saint-Denis de nombreux fragments d’un autel dont le fond était entièrement revêtu de ces verres blancs appliqués sur des peintures presque aussi fines que celles qui ornent les marges des manuscrits. Ces procédés si simples ont été en usage pendant les XIIIe, XIVe et XVe siècles, mais plus particulièrement à l’époque de saint Louis.

Quant aux applications de terres cuites vernissées, elles sont devenues fort rares, étant surtout employées dans les édifices civils et les maisons particulières ; nous citerons cependant comme exemple une maison en bois