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CANNELURE, s. f. C’est une moulure en forme de petit canal creusé verticalement sur la circonférence des colonnes ou sur les faces des pilastres. Les Grecs avaient adopté la cannelure sur les fûts des colonnes des ordres dorique, ionique et corynthien ; les Romains l’employèrent également, autant que les matières dont étaient composées leurs colonnes le permettaient ; aussi voyons-nous, en France, la cannelure appliquée aux colonnes et pilastres de l’époque romane dans les contrées où l’architecture romaine avait laissé de nombreux vestiges. En Provence, le long du Rhône et de la Saône, et jusqu’en Bourgogne, des cannelures sont parfois creusées, pendant le XIIe siècle, sur les colonnes, mais plus particulièrement sur les faces des pilastres. Il se faisait alors une sorte de renaissance, qui, dans ces contrées couvertes de fragments antiques, conduisait les architectes à imiter la sculpture romaine, que la filiation romane avait peu à peu dénaturée. Ce retour vers les détails de la sculpture antique est très-sensible au portail de l’église de Saint-Gilles, dans le cloître de Saint-Trophyme à Arles, au Thor, à Pernes, à Cavaillon en Provence, dans toutes ces églises qui bordent le Rhône ; puis, plus au Nord, à Langres, à Autun, à Beaune, à Semur en Brionnais, à la Charité sur Loire, à Cluny. Dans l’architecture de ces pays, le pilastre est préféré à la colonne engagée, et toujours le pilastre est cannelé ; et, il faut le dire, sa cannelure est d’un plus beau profil que la cannelure romaine, trop maigre et trop creuse, mal terminée au sommet par un demi-cercle dont la forme est molle, confuse près de la base, lorsqu’elle est remplie par une baguette. La cannelure occidentale du XIIe siècle se rapproche des profils et de l’échelle des cannelures grecques, comme beaucoup d’autres profils de cette époque.

Nous donnons (fig. 1) un des pilastres du triforium de la cathédrale de Langres, dont la face présente une seule cannelure ; et (fig. 2) un des

    n’est-il pas, à notre sens, de spectacle plus touchant, dans nos églises, que la vue de ces femmes venant silencieusement s’agenouiller devant les terribles scènes de la Passion, et les suivre ainsi une à une jusqu’à la dernière. Pourquoi faut-il que ces prières si respectables (car elles ne sont inspirées ni par un désir ambitieux, ni par des souhaits indiscrets, mais par la douleur et le besoin de consolation) soient adressées à Dieu devant des images presque toujours hideuses ou ridicules, qui déshonorent nos églises ? Ces tableaux des stations sont fabriqués en bloc, à prix fixes, se paient au mètre ou en raison du plus ou moins de couleur dont elles sont barbouillées ; elles sortent des mêmes ateliers qui envoient en province des devants de cheminée graveleux, des scènes bachiques pour les tavernes, et, il faut bien le dire, au point de vue de l’art, ces peintures n’ont même pas le mérite des papiers peints les plus vulgaires. Il nous semble que les images qui doivent trouver place dans les églises, même les plus humbles, pourraient être soumises à un contrôle sévère de la part des membres éclairés du haut clergé ; qu’elles soient parfaites, cela est difficile ; mais faudrait-il au moins quelles ne fussent jamais ridicules ou repoussantes ; qu’elles ne fussent pas, comme art, au-dessous de ce que l’on voit dans les cabarets. Sinon, mieux vaut une simple inscription ; si pauvre que soit l’imagination de celui qui prie, elle lui peindra les scènes de la Passion d’une manière plus noble et plus digne que ne le font ces tableaux grotesques.