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XIIIe siècle, lorsqu’on construisit la façade actuelle, probablement parce que ces sculptures semblèrent trop remarquables pour être détruites. C’était d’ailleurs un usage assez ordinaire, au moment de cet entraînement qui faisait reconstruire les cathédrales, de conserver un souvenir des édifices primitifs, et l’exemple cité ici n’est pas le seul, ainsi que nous le verrons. En 1160, Maurice de Sully, évêque de Paris, résolut de réunir les deux églises en une seule, et il fit commencer la cathédrale que nous voyons aujourd’hui[1], sous l’unique vocable de Sainte-Marie. En 1196, Maurice de Sully mourut en laissant cinq mille livres pour couvrir le chœur en plomb ; donc, alors, le chœur était achevé jusqu’au transsept, ce que vient confirmer le caractère archéologique de cette partie de Notre-Dame de Paris. Il y a tout lieu de croire même que la nef était élevée alors jusqu’à la troisième travée après les tours, à quelques mètres au-dessus du sol. Eude de Sully, successeur de Maurice, continua l’œuvre jusqu’en 1208, époque de sa mort. La grande façade et les trois premières travées de la nef furent seulement commencées à la fin de l’épiscopat de Pierre de Nemours, vers 1218 ; car ce fut seulement à cette époque, d’après le Martyrologe de l’église de Paris cité par l’abbé Lebeuf, qu’on détruisit les restes de la vieille église de Saint-Étienne qui gênaient les travaux. À la mort de Philippe-Auguste, en 1223, le portail était achevé jusqu’à la base de la grande galerie à jour qui réunit les deux tours. Il y eut évidemment, à cette époque, une interruption dans les travaux ; le style du sommet de la façade et la nature des matériaux employés ne peuvent faire douter que les tours, avec la grande galerie qui enceint leur base, aient été élevés, vers 1235, fort rapidement. Alors la cathédrale était complètement terminée, sauf les flèches qui devaient surmonter les deux tours.

Nous donnons (fig. 1)[2] le plan de cette église primitive dépouillé des adjonctions faites depuis cette époque. Comme on peut le voir, cette vaste église était dépourvue de chapelles, ou, s’il en existait, elles n’étaient qu’au nombre de trois, fort petites, et situées derrière l’abside en L ; car nous avons retrouvé la corniche extérieure du double bas-côté sur presque tous les points de la circonférence de ce double bas-côté absidal ; ces chapelles ne pouvaient donc être percées qu’au-dessous de cette corniche, et, par conséquent, n’occuper qu’une faible hauteur et un petit espace. Nous serions plutôt portés à croire que trois autels étaient placés contre la paroi de ce double bas-côté : l’un dédié à la Vierge, l’autre à saint-Étienne, et le troisième à la sainte-Trinité. Mais ce qu’on avait voulu surtout obtenir en traçant ce plan si simple, c’était un vaste espace pour contenir le clergé et la foule devant et autour de l’autel principal placé au centre du sanctuaire. En E était une galerie à deux étages, dont les traces ont été retrou-

  1. Voir, pour de plus amples détails, l’Itinér. archéol. de Paris, par M. le baron de Guilhermy.--Paris, 1855.
  2. L’échelle de ce plan, ainsi que de tous ceux qui vont suivre, est de 0,001m pour mètre.