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[cloître]
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de l’architecture sur le sol des provinces françaises jusqu’au XIIe siècle. L’esprit provincial s’éteignant sous la main du pouvoir royal, cette variété s’efface. Si la nation y gagna au point de vue de la politique, l’art y perdit de son originalité, et les reproductions des types mis en honneur dans le domaine royal furent souvent incomplètes ou mal comprises dans les provinces éloignées. Cependant les clochers furent longtemps les monuments affectionnés par les villes ; après chaque désastre, les populations s’empressaient de les reconstruire ou de les réparer du mieux qu’elles pouvaient. On dit encore, de notre temps, l’influence de clocher, pour désigner l’esprit local, la défense exclusive des intérêts de la ville, et nous voyons chaque jour de pauvres villages s’imposer de lourdes charges pour élever un clocher sur leur église.

L’état des arts de l’architecture aujourd’hui ne répond pas aux désirs et aux efforts des populations des villes ou des campagnes, et les clochers, en grand nombre, construits dans notre pays depuis trente ans, ne fourniront pas, dans quelques siècles, un sujet d’étude intéressant pour nos successeurs : mal conçus généralement, plus mal bâtis, présentant des silhouettes lourdes ou démanchées, ils ne dureront guère, et s’ils sont laids la plupart, nous pouvons au moins nous en consoler en pensant qu’ils ne témoigneront pas longtemps de ce retour vers l’un des goûts les plus vifs des populations au moyen âge. Après les tours carrées, froides et flanquées de pilastres, élevées sur nos églises, de 1815 à 1840, on a cherché à se rapprocher des types laissés par les XIIe et XIIIe siècles ; mais ces derniers essais font, la plupart, ressortir la faiblesse de nos études et la pauvreté d’invention des artistes modernes.

CLOITRE, s. m. Cloistre, clouastre. Cour entourée de murs et de galeries établies à côté des églises cathédrales, collégiales et monastiques. Dès les premiers temps du christianisme, des cloîtres furent élevés dans le voisinage immédiat des églises. La forme des cloîtres en plan est généralement celle d’un carré[1]. Les abbayes possédaient deux cloîtres : l’un près de l’entrée occidentale de l’église ; l’autre à l’Orient, derrière l’abside. Le premier donnait accès dans les réfectoires, les dortoirs, la salle capitulaire, la sacristie, le chauffoir et les prisons ; c’était le cloître des religieux dans lequel tous pouvaient circuler. Le second était particulièrement

  1. « Quadratam speciem structura domestica præfert,
    Atria bis binis inclyta particibus.
    Quæ tribus inclusæ domibus, quas corporis usus
    Postulat, et quarta quæ domus est Domini,
    Quarum prima domus servat potumque cihumque
    Ex quibus hos reficit juncta secunda domus.
    Tertia membra fovet vexata labore diurno,
    Quarta Dei laudes assidue resonat. »

    Carmen de Laude vitæ monasticæ edit. a Sirmondo ad Goffrid. Vindocin. (Voy. Ducange, Gloss.)