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[cloître]
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faire connaître les modifications successives apportées dans ces constructions et de présenter les exemples les plus complets et les plus remarquables que le temps et la main des hommes n’ont pas détruits. Les cloîtres encore debout, abandonnés, sans usage aujourd’hui, construits la plupart très-légèrement, tendent tous les jours à disparaître, et notre travail pourra perpétuer pour l’étude des œuvres dont il ne restera bientôt plus trace[1].

Nous avons vu déjà qu’à Laon les constructeurs avaient vitré les ouvertures supérieures prises sous les formerets des voûtes du cloître et avaient laissé les arcatures inférieures libres, comme les anciennes galeries romanes. Mais à Laon, bien que ce cloître soit déjà gothique par ses voûtes, la claire-voie inférieure est complètement distincte de la rose vitrée, comme dans les cloîtres de transition, tels que ceux de Fontenay et de Fontfroide. Cette disposition ne fut pas longtemps conservée ; bientôt tout l’espace compris entre les formerets, les piles et le bahut, fut rempli par des meneaux ; mais ces meneaux ne furent pas entièrement vitrés comme ceux des fenêtres des collatéraux d’une église. On se contenta d’abord de vitrer les compartiments supérieurs et de laisser à jour les intervalles entre les colonnettes. Il existe un cloître de ce genre, d’une disposition charmante, sur le flanc sud de l’église collégiale de Sémur-en-Auxois. Il est fort petit, puisque chacun de ses côtés ne contient que deux travée.

En voici le plan entier (25), à l’échelle de 0,005 millimètres pour mètre. Profitant avec une intelligence rare des poussées égales qui, dans les angles, agissent en sens contraire et se neutralisent par conséquent, l’architecte, au lieu de donner à ces angles, comme dans les cloîtres romans, une épaisseur considérable, en a fait une pile composée de six colonnettes réunies et prises dans un seul morceau de pierre. Cette jolie disposition donne une légèreté extraordinaire à ce cloître, tout en lui conservant une parfaite solidité. Les seuls points résistants de la construction sont les quatre contre-forts plantés sur le milieu de chacune des faces de la galerie et les divisant en deux travées. Un puits est creusé au milieu du petit préau.

La fig. 26 présente la coupe et l’élévation d’une travée du cloître de Sémur, ainsi qu’un détail du plan des piles en A. Les intervalles entre les colonnettes n’étaient pas vitrés, tandis que les compartiments des meneaux au-dessus de l’arcature l’étaient[2]. On obtenait ainsi, pour

  1. En compulsant nos notes, nous sommes obligé de reconnaître que, depuis le temps où quelques-unes d’entre elles ont été prises, des exemples de cloîtres encore existant il y a quelques années sont aujourd’hui détruits. On ne doit point s’en étonner ; la vie s’est retirée de ces dépendances des églises depuis longtemps, et bien avant les dernières années du dernier siècle déjà, la plupart des cloîtres des cathédrales et des abbayes étaient laissés à l’abandon, comme des constructions qui n’ont plus de raison d’être.
  2. Ce cloître est aujourd’hui engagé dans des constructions plus récentes et en partie