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marbre et de chapiteaux historiés, et sont assez vastes pour contenir un grand nombre de fidèles ; elles possèdent le plus souvent deux escaliers, afin de permettre aux nombreux pèlerins qui venaient implorer l’assistance des saints dont les restes étaient déposés sous leurs voûtes de descendre processionnellement par l’un des degrés et de remonter par l’autre. On évitait ainsi le désordre et la confusion.

Les cryptes, sauf de rares exceptions, reçoivent du jour par d’étroites fenêtres ouvertes sur le dehors de l’église ou sur les bas-côtés du sanctuaire. Cette dernière disposition paraît avoir été adoptée lorsque les cryptes étaient creusées sous les chœurs des églises romanes entourés d’un collatéral. Ainsi les ouvertures qui donnaient de l’air et de la lumière dans la crypte débouchaient dans l’enceinte du lieu consacré. Alors les chœurs étaient élevés au-dessus du pavé du pourtour, ce qui ajoutait à la solennité des cérémonies religieuses, et ce qui permettait même à l’assistance de voir, du bas-côté, ce qui se passait dans la crypte. La plupart des églises rhénanes conservent encore cette disposition, que nous voyons adoptée dans une petite église dont quelques parties paraissent remonter au VIe siècle ; nous voulons parler de l’église de Saint-Martin-au-Val de Chartres. « On pénétrait primitivement dans la crypte, » dit M. Paul Durand, dans la description fidèle qu’il a donnée de cet édifice[1], « par deux petites portes placées à droite et à gauche de sa partie occidentale. Ces portes existent encore… Il est probable qu’autrefois le spectateur, placé dans la grande nef, pouvait apercevoir l’intérieur de la crypte par une ouverture médiane, ou deux ouvertures latérales pratiquées dans sa face occidentale, comme on le voit encore dans plusieurs églises du centre et de l’ouest de la France… » Il y a entre le sol du sanctuaire relevé et celui du bas-côté une différence de niveau suffisante pour qu’on ait pu pratiquer des fenêtres dans le soubassement des arcades du chœur, de manière à éclairer la crypte et à permettre de voir l’intérieur de cette crypte, dont les voûtes reposent sur deux rangées de quatre colonnettes chacune. Bien que l’église ait été mutilée et reconstruite en partie à plusieurs reprises, cependant les bases des colonnettes de la crypte et quelques chapiteaux primitifs sont d’un travail qui appartient à une époque très-reculée, voisine encore des arts du Bas-Empire, et présentant tous les caractères de la sculpture de la crypte célèbre de La Ferté-sous-Jouarre[2].

Les cryptes romanes n’ont guère qu’une hauteur de trois à quatre mètres du sol à la voûte ; il fallait alors que ces voûtes fussent portées sur un quinconce de colonnes, si la crypte occupait en superficie un espace assez étendu. Toutefois, les cryptes étant creusées sous une abside ou

  1. Rapport sur l’église et la crypte de Saint-Martin-au-Val, à Chartres, par M. Paul Durand. Chartres, 1858.
  2. Voy. la publication des Archives des monuments historiques, sous les auspices de S. E. M. le ministre d’État. Gide, édit.