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un bon fond, ces enduits durent longtemps ; mais ils n’acquièrent jamais de fermeté. Ils n’ont d’autre avantage que de ne pas coûter cher et d’être fort légers.

ENFER, s. m. Le séjour des damnés est représenté habituellement dans les peintures et les sculptures du moyen âge par une gueule monstrueuse dans laquelle s’engloutissent les réprouvés. Dans l’Office des morts, on lit cette prière : « Libera me, Domine, de morte œterna, de manu inferni, de ore leonis, etc. » Les artistes anciens ont traduit le texte à la lettre. Sur le linteau de la porte principale de la cathédrale d’Autun, qui date du XIIe siècle, on voit, en effet, dans le Jugement dernier, du côté des damnés, deux mains colossales qui s’emparent d’un ressuscité. Quant aux gueules indiquant l’entrée de l’enfer, on les retrouve sur quantité de bas-reliefs et de peintures. L’idée de classification des damnés dans l’enfer par genres de peines en raison des causes de la damnation est une idée dont on retrouve très-anciennement la trace dans les monuments du moyen âge, et le Dante n’a fait que donner à ces traditions une forme poétique, qui résume dans son œuvre tout ce que les artistes occidentaux avaient peint ou sculpté sur les monuments religieux. En effet, dans des édifices des XIe et XIIe siècles, nous voyons l’avarice, la luxure, l’orgueil, la paresse, etc., subissant en enfer des peines proportionnées à ces vices. Les avares sont accablés sous le faix de sacoches d’argent suspendues à leur cou ; ceux qui se sont abandonnés aux plaisirs des sens sont dévorés par des animaux immondes ; les orgueilleux sont précipités à bas de chevaux lancés au galop ; des crapauds s’attachent aux lèvres des calomniateurs, etc. (voy. jugement dernier, vice).

ENGIN, s. m. On donnait ce nom à toute machine ; d’où est venu le mot engineor, engingneur, pour désigner l’homme chargé de la fabrication, du montage et de l’emploi des machines ; d’où le nom d’ingénieur donné de nos jours à toute personne occupée de l’érection des ponts, du tracé des voies, de la construction des usines, des machines, des navires, des fortifications, etc. ; d’où enfin le nom de génie donné au corps.

Parmi les engins du moyen âge, il y a les engins employés pour un service civil, comme les engins propres à monter ou transporter des fardeaux, les grues, les chèvres, les treuils, les machines hydrauliques, les presses ; puis les engins de guerre, lesquels se divisent en engins offensifs, engins défensifs et engins à la fois offensifs et défensifs.

Il est certain que les Romains possédaient des machines puissantes pour transporter et monter les matériaux énormes qu’ils ont si souvent mis en œuvre dans leurs constructions. Vitruve ne nous donne sur ce sujet que des renseignements peu étendus et très-vagues. Les Grecs étaient fort avancés dans les arts mécaniques ; ce qui ne peut surprendre, si l’on songe aux connaissances qu’ils avaient acquises en géométrie dès une