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il fallait toujours poser le pied gauche sur la marche A, le pied droit sur la marche B en descendant, ou le contraire en montant. Le tracé perspectif C fait comprendre le système de ces degrés[1]. On le reconnaîtra, ce n’est jamais la subtilité qui fait défaut à nos architectes du moyen âge. Mais ces derniers exemples ne fournissent que des escaliers de service.

Escaliers intérieurs. — C’est-à-dire, desservant plusieurs étages d’un bâtiment, posés dans des cages comprises dans les constructions ou accolées à ces constructions. Les escaliers à vis, comme nous l’avons dit précédemment, furent employés par les Romains ; les architectes du moyen âge adoptèrent ce système de préférence à tout autre, variant les dimensions des escaliers à noyau en raison des services auxquels ils devaient satisfaire. Ces sortes d’escaliers présentaient plusieurs avantages qu’il est important de signaler : 1o ils pouvaient être englobés dans les constructions ou n’y tenir que par un faible segment ; 2o ils prenaient peu de place ; 3o ils permettaient d’ouvrir des portes sur tous les points de leur circonférence et à toutes hauteurs ; 4o ils s’éclairaient aisément ; 5o ils étaient d’une construction simple et facile à exécuter ; 6o ils devenaient doux ou rapides à volonté ; 7o pour les châteaux, les tours, ils étaient barricadés en un moment ; 8o ils montaient de fond jusqu’à des hauteurs considérables sans nuire à la solidité des constructions voisines ; 9o ils étaient facilement réparables.

Les plus anciens escaliers à vis du moyen âge se composent d’un noyau en pierre de taille, d’une construction en tour ronde, d’un berceau en spirale bâti en moellon, reposant sur le noyau et sur le parement circulaire intérieur. Cette voûte porte des marches en pierre dont les arêtes sont posées suivant les rayons d’un cercle. La fig. 7 représente en plan et en coupe, suivant la ligne AB du plan, un de ces escaliers si fréquents dans les édifices des XIe et XIIe siècles. La porte extérieure de l’escalier étant en D, la première marche est en C. Ces marches sont posées sur un massif jusqu’au parement G ; à partir de ce point commence la voûte spirale que l’on voit figurée en coupe. Les tambours du noyau portent un petit épaulement H pour recevoir les sommiers du berceau qui, de l’autre part, sont entaillés dans le mur circulaire I. Les marches sont posées sur l’extrados du berceau rampant et se composent de pierres d’un ou de plusieurs morceaux chacune. Généralement ces voûtes rampantes sont assez grossièrement faites en petits moellons maçonnés sur couchis. Les voûtes des escaliers du chœur de l’église abbatiale d’Eu, qui datent du XIIe siècle, sont cependant exécutées avec une grande précision ; mais les Normands étaient dès lors de très-soigneux appareilleurs. Voici, fig. 8, comme sont taillés les tambours du noyau qui reçoivent les sommiers du

  1. On voit encore un escalier de ce genre sur les parties supérieures de l’église de Saint-Nazaire de Carcassonne, et à Notre-Dame de Paris dans les galeries du transsept.