Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 8.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[sculpture]
— 121 —

ont tous deux les yeux bien ouverts, les arcades sourcilières semblables, la bouche identique, la mâchoire fine, le nez délicat[1].

Entrons dans une autre province ; en Poitou vers la même époque, c’est-à-dire de 1120 à 1140, la statuaire abonde sur les monuments. Cette statuaire est fortement empreinte du style byzantin, mais cependant l’individualisme, l’étude de la nature se fait sentir.

Voici (fig. 10) la tête d’une femme faisant partie d’un relief représentant la naissance du Sauveur, sur la façade de Notre-Dame-la-Grande, Poitiers. Qui ne reconnaîtrait là un de ces types si fréquents dans le Poitou ? L’angle externe de l’œil est abaissé, le nez est fort, droit, formant avec le front une ligne continue, le front est bien fait mais bas, la partie supérieure du crâne plate, la bouche près du nez et les lèvres charnues, la mâchoire ronde et développée, les joues grandes, les cheveux lisses. Mais nous devons limiter cet examen de l’observation des types humains à quelques exemples et reprendre l’historique des diverses écoles de sculpture du sol français.

Les influences byzantines n’ont pas été les seules qui aient permis à l’art de la sculpture de se relever de l’état de barbarie absolue où il était tombé.

Il est certain que des éléments d’art, très-peu développés il est vrai, avaient été introduits par les envahisseurs des Ve et VIe siècles. Les Burgondes, entre tous ces barbares venus du nord-est, semblent avoir apporté avec eux quelques-uns de ces éléments tout à fait étrangers aux arts de la Rome antique et même de Byzance.

Il existe dans les cryptes de l’ancienne rotonde de Saint-Bénigne, à Dijon, rebâtie en 1001 par l’abbé Guillaume, des fragments de l’édifice

  1. Les deux statues de Notre-Dame de Corbeil étaient peintes. On voit encore sur la tête de la femme la coloration des sourcils et des prunelles. Mais nous devons revenir sur cette question de la peinture de la statuaire.