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[serrurerie]
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qu’elles sont soudées, on les ouvre et sépare l’une de l’autre, autant que la porte a d’épaisseur, puis on les recourbe, le plus quarrément que l’on peut pour les faire joindre et serrer des deux costez de la porte, principallement du costé de dehors : ceste façon de bandes vaut mieux que les communes parce qu’elles prennent les deux costez de la porte. On y en met trois pour l’ordinaire ; on y met quelquefois deux de ces bandes flamandes, ou d’autres droictes, avec un pivot au bas qui prend souz la porte qui vaut encore mieux, pourveu qu’il soit bien fait et mis comme il faut… » En effet, les pentures de portes pendant le moyen âge étaient exactement fabriquées ainsi que Jousse l’indique encore au commencement du XVIIe siècle. Ces pièces de fer ont, au point de vue de l’art du forgeron, une importance considérable. L’ouvrier qui peut forger une penture dans le genre de celles que nous trouvons si fréquemment attachées aux portes des édifices des XIIe et XIIIe siècles, atteint les dernières limites de son art et peut façonner les pièces les plus difficiles.

La figure 1 montre divers genres de pentures. En A, est la penture simple avec son œil en b, son collet en c, le crampon d’attache derrière le renflement du collet en d. B est le géométral de la penture en coupe sur le vantail ; d’ est le crampon avec sa double rivure en e ; en f, le scellement du gond. La ligne ops indique la feuillure du jambage. Souvent la rive du vantail est entaillée pour arriver à fond de feuillure, et l’œil de la penture est détourné, ainsi qu’on le voit en m, détail C. Alors l’œil a moins de champ que le plat de la penture, pour ne pas trop affamer le bois, conformément au tracé perspectif G. Une rondelle g est interposée entre le renfort carré h du gond et cet œil. Les pentures flamandes à doubles bandes sont façonnées suivant les tracés I et K. Les pentures les plus anciennes ont, soudé à leur collet, un arc de fer qui embrasse puissamment les frises du vantail près de la rive (voyez en L). Ce système, adopté dès le XIe siècle, présente une difficulté de soudure, car il faut refouler le fer de manière à en faire sortir les deux souches des branches, afin de souder celles-ci, puis laisser une queue suffisante pour rouler l’œil, le souder et courber l’extrémité (voyez en C). Ces opérations demandent du soin, pour ne pas brûler le fer et pour que les soudures des deux branches courbes soient largement faites, le fer ayant juste le degré de chaleur convenable. Mais ces difficultés ne sont rien, comparées à celles qui résultent de la soudure des branches nombreuses dont se composent souvent ces pentures et qui sortent de la tige principale. Il ne faudrait pas croire que les branches multipliées soudées à la bande des pentures sont de simples ornements. Ces branches, percées de trous, permettant de multiplier les clous, maintiennent fortement les frises de bois entre elles, forment sur les vantaux comme une sorte de réseau de fer, et empêchent les bandes de donner du nez, c’est-à-dire de fléchir sous le poids des frises. Les forgerons trouvèrent dans cette nécessité de structure un motif d’ornementation. Les plus anciennes pentures sont, en effet, com-