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Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 9.djvu/244

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de fenêtres B et C. Les voûtes des bas côtés, à rez-de-chaussée, se composent d’arcs-doubleaux D et F, portant des berceaux perpendiculaires à la nef et concentriques aux archivoltes E. Les pilettes G, qui formaient comme un second collatéral étroit, avaient pour objet de diminuer l’effet de poussée qu’aurait exercé l’arc-doubleau unique sur le mur de clôture H. Au premier étage, l’arc-doubleau I, ne portant qu’un solivage de bois, ne pouvait exercer sur le mur H une poussée que ce mur renforcé de contre-forts cylindriques ne put maintenir. Le grand mur A se trouvait étrésillonné par ces berceaux du rez-de-chaussée et par les arcs-doubleaux de la galerie. Il n’était décoré, suivant l’usage du temps, que par des peintures[1].

Cet exemple d’une nef construite au commencement du XIe siècle indique un premier effort pour sortir des données de la basilique romaine antique. Ce sont des faisceaux de colonnettes qui remplacent les colonnes monostyles, et des voûtes portent déjà le sol de la galerie supérieure. Cependant ces grands murs n’étaient reliés dans leur développement qu’à leur sommet, par les entraits des charpentes ; ils n’étaient pas construits avec les excellents matériaux et mortiers qu’employaient les Romains ; ils bouclaient souvent ou se déversaient d’un côté ou de l’autre. Leur aspect ne laissait pas d’être froid, et les peintures dont on les décorait, vues obliquement, poudrées par le temps, perdaient bientôt leur éclat. Les charpentes, à cette hauteur, ne pouvaient être que difficilement réparées, et si le feu y prenait, l’édifice entier était perdu. On songea donc à diviser franchement les nefs par travées apparentes, accusées par de grands arcs-doubleaux. Un autre édifice du milieu du XIe siècle nous fournit un exemple de ce nouveau parti. C’est l’église de Notre-Dame du Pré, au Mans. Dans la nef de cet édifice, chaque travée comprend deux arcades (fig. 2). Une grosse pile à section quadrangulaire, flanquée de colonnes engagées, alterne avec une pile cylindrique. Au droit de chacune des grosses piles A est bandé un arc-doubleau B. Une ferme de charpente est posée au droit de la pile cylindrique C. Les collatéraux D sont fermés par des voûtes d’arête avec arcs-doubleaux reposant sur les colonnes engagées des grosses piles et sur les chapiteaux des piles cylindriques. Les chevrons de la charpente, posés longitudinalement, comme un solivage, portaient sur les

  1. Au XIIe siècle, des voûtes ayant été construites sur cette nef et appuyées sur des colonnettes accolées aux piliers avec assez d’adresse, des arcs-boutants durent les contre-buter. Les berceaux des collatéraux furent détruits, ainsi que les pilettes G, et des voûtes d’arête les remplacèrent. Cependant la disposition des voûtes en berceaux perpendiculaires aux murs fut conservée dans le transsept. Ces travaux ne purent qu’altérer la solidité de l’édifice bâti de matériaux de petites dimensions ; si bien qu’on dut (il y a quelques années) reconstruire les voûtes hautes en matériaux légers et restaurer les parties intérieures. Ces travaux ont malheureusement fait disparaître des traces curieuses de la disposition première. On voit encore cependant, sur plusieurs points, les sommiers S des arcs-doubleaux des collatéraux primitifs.