Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné du mobilier français de l'époque carlovingienne à la Renaissance (1873-1874), tome 5.djvu/157

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Il faut recourir, pour les détails de cette belle armure française, aux articles Armet, Brassard, Corselet, Cuissot, Gantelet, Grève et Tassettes.

À cette époque et même antérieurement, les fabriques d’armes les plus renommées étaient à Milan, et, en France, à Poitiers, à Bourges, à Beauvais et à Paris. Pavie était, dès le xiie siècle, renommée pour la fabrication des heaumes. Dans le Nord, on fabriquait de bonnes armures, à Arras, à Gand, et en Allemagne à Nuremberg, dès le xiv. En notre qualité de mauvais conservateurs, nous avons peu d’armures de fer françaises dans nos musées ; par compensation, nous en possédons un assez grand nombre provenant d’Allemagne et de fort belles, mais elles n’ont pas la grâce que possèdent celles que l’on faisait chez nous. Les armures de fer de Nuremberg, dont il existe un assez grand nombre d’exemples et qui datent de 1450 environ, sont belles, admirablement forgées ; toutefois elles manquent de souplesse, malgré la multiplicité de leurs pièces, et sont généralement plus lourdes que les nôtres. Les garde-bras sont exagérés, les angles saillants abondent ; les gantelets avec grandes gardes sont gênants. L’armet si fin, si bien composé, est remplacé par la bavière immobile qu’affectionnaient les Allemands, et par la salade à visière, pouvant être enlevée d’un bon coup de lance. Les spallières, très-articulées, sont encore garnies de rouelles, pièces si faciles à faire sauter. Les planches III et IV donnent une de ces armures de Nuremberg, provenant de la belle collection de M. le comte de Nieuwerkerke et datant de 1450 environ, avec le chanfrein, le harnais du cheval et la selle avec son garde-corps d’acier. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette belle armure, dont tous les détails méritent un examen attentif.

Beaucoup de chevaliers français se faisaient faire des armures soit en Italie, à Milan, soit en Allemagne, surtout à dater du milleu du xve siècle. Déjà Charles V avait approvisionné son arsenal du Louvre d’une grande quantité d’armures de Milan, ainsi que nous l’apprend Christine de Pisan ; mais alors ces armures de Milan consistaient surtout en des pièces de mailles. « Il fist (Charles V) pourveance de riches armeures, beauls destriers amenre d’Alemaigne, de Pulle (Pouille), courciers, haubergons et azarans (jazerans) camailz forgiez à Millau à grant foison apportés par deçà, par l’affinité messer Barnabo, lors seigneur dudit lieu ; à Paris faire toutes pièces de harnois : et de tout ce donna largement aux compaignons d’armes, aux riches gentilz hommes les