Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné du mobilier français de l'époque carlovingienne à la Renaissance (1873-1874), tome 5.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à-dire que, par-dessus la brigantine, on laçait la pansière et la braconnière. Mais c’était là un harnais d’homme d’armes (fig. 5[1]).

Ce gentilhomme est le sire de Quadudal, Breton[2]. Il est richement armé d’une brigantine grise avec pansière et braconnière sans tassettes, mais avec jupon de mailles. Sur le colletin de la bavière est un collier de grains d’or. Il est coiffé d’une salade. Les arrière-bras sont garantis par de la maille avec spallières et rondelles d’acier. Les avant-bras sont armés de canons avec cubitières. Les jambes sont complètement armées.

La seconde brigantine du musée d’artillerie de Paris, qui date de 1470 environ, montre des rivets très-approchés et disposés longitudinalement (fig. 6).

En A, la moitié de la partie de devant de la brigantine est montrée à l'intérieur. On voit ainsi parfaitement la structure des lames d’acier très-ingénieusement disposées aux entournures ; les rivets sont de laiton. Ces rivets réunissent ces lames d’acier à une première enveloppe externe de toile, recouverte d’une seconde enveloppe de velours de soie (voyez la coupe B). Nulle doublure à l’intérieur. Ce vêtement se posait sur un gambison de peau ou de toile. En C, les rivets sont montrés grandeur d’exécution, avec leur espacement.

Les plus nobles personnages ne dédaignaient point, pendant le xve siècle, de porter la brigantine. Dans sa Chronique, Lefèvre de Saint-Remi dit qu’au mois d’août « le roy ouy messe à Crespy, puis monta à cheval, armé d’une brigandine et se tira aux champs, là où il trouva une belle compaignye et grande quy l’attendait » (pour combattre les Anglais dans la plaine, en face de Mont-Espilloy).

Les arbalétriers génois qui étaient au service du roi de France pendant le xive siècle étaient vêtus de brigantines. Plus tard, les archers à pied et à cheval les endossèrent aussi. A la fin du xve siècle, on se servait beaucoup, dans l’infanterie française, de la brigantine italienne qui était légère, sans manches, posée par-dessus un jacque de mailles, et que l’on pouvait allonger au besoin par devant, au moyen d’une sorte de tablier attaché par des aiguillettes. La figure 7 présente un de ces fantassins habillé à l’italienne[3]. Il est vêtu d’une

  1. Manuscr. Biblioth. nation., Froissart (1440 environ).
  2. Il fait prisonnier le comte de Blois. On doit observer que ces vêtements ne sont pas ceux de l’époque des faits relatés par le chroniqueur, mais bien ceux du temps où le manuscrit a été copié (1440 environ).
  3. Accademia de Venise, tableau de Carpaccio, n° 544 du Catalogue.