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[ ARMURE ]
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effet, plus la saillie du mézail se prononce, car c’était sur ce point que les coups de lance étaient dirigés.

La planche i présente un très-bel armet de guerre provenant du Musée d’artillerie de Paris[1]. Le nasal seul se relève, et au-dessus de la visée est une doublure ou frontal d’acier gravé et doré. Pour mettre l’armet sur la tête ou l’enlever, la ventaille s’ouvre en deux parties, ainsi que le fait saisir notre planche, en B. Ici la partie supérieure du gorgerin fait partie de l’armet et pose sur le colletin. Cette brisure est fixée au moyen d’un bouton a passant par un trou, d’un goujon à clef b (voy. en b’), et d’un second goujon saillant extérieurement, qui entre dans un autre trou pratiqué au-dessous du premier. Le trou à travers lequel passe le goujon à clef est percé, ainsi qu’il est indiqué en d, de sorte qu’en tournant l’arrêt du goujon b’, les deux pièces ne se peuvent disjoindre. En outre, un bouton c (voy. en c’) passe à travers un troisième trou pratiqué dans l’orle du gorgerin doublé d’une bande d’acier garnie et dorée. La planche i montre en A l’armet de profil, le mézail étant baissé. La bande du gorgerin est percée de trous pour recevoir un camail de mailles. La queue du tymbre porte une tige e à laquelle était rivée la rondelle ou volet. Au moyen d’une courroie intérieure, cette queue fixait l’armet à la dossière. La crête, divisée en deux arêtes, est percée de trois trous propres à attacher le plumait. Cet armet date des dernières années du xve siècle ; il est d’une exécution parfaite, de bel acier poli, avec gravures et dorures partielles. La rondelle ici masquait les sutures des deux joues de la ventaille ; elle servait de petite targe pour préserver des coups de revers, comme nous l’avons dit. A la tige du volet était fixée une longue écharpe ou un plumail.

ARMURE, s. f. On ne peut donner ce nom qu’aux harnais de guerre ou de joute composés entièrement de plates, c’est-à-dire de pièces de forge assemblées, de fer ou d’acier. Ce n’est en effet qu’au xve siècle que le nom d'armures de fer est donné aux gens d’armes montés et armés de toutes pièces. On disait, depuis le règne de Charles vii jusqu’au commencement du xvie siècle : « Tel capitaine s’en vint avec vingt-cinq armures de fer », ce qui s’entendait comme vingt-cinq cavaliers armés de toutes pièces, accompagnés de leurs écuyers, varlets, coutilliers, etc., ce qui donnait cinquante hommes à cheval et soixante au moins à pied. Plus tard on dit « tant de lances », pour désigner tant de cavaliers armés. Le nom d'armure

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  1. N°30 du Catalogue.