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de blanc brillant il devient noir irisé. Cependant le moine Théophile qui écrivait au XIIe siècle, dans son Essai sur divers arts, parle de feuilles d’argent appliquées sur les murs ou les plafonds ; il donne aussi le moyen de nettoyer des plaques d’or ou d’argent fixées au moyen de clous. En effet dès les premiers siècles du moyen âge on revêtissait souvent des autels, des châsses, des tombeaux en bois ou en pierre de plaques d’argent naturel ou doré. Dom Doublet dit dans son ouvrage sur les antiquités de l’abbaye de Saint-Denis, que le roi Dagobert fit couvrir l’église de ce monastère de « plomb partout, excepté en certaine partie tant du dessus que du dedans « de ladite église qu’il fit couvrir d’argent, à sçavoir à l’endroit où reposoient « iceux saincts martyrs…[1] »

À l’imitation de certains ouvrages du Bas-Empire, pendant la période romane, on incrustait souvent des parties d’argent dans les bronzes qui recouvraient les portes des églises, les jubés, les tombeaux ; des figures avaient souvent les yeux ou les broderies de leurs vêtements en argent ciselé. Dans les œuvres de grande orfévrerie monumentale, l’argent doré (vermeil) jouait un grand rôle (voy. Autel, Tombeau).

À partir du XIIIe siècle, on décora souvent les intérieurs des édifices de plaques de verre coloré sous lesquelles, pour leur donner plus d’éclat, on apposait des feuilles d’argent battu (voy. Application).

ARMATURE, s. f. On désigne par ce mot toute combinaison de fer ou de bois destinée à renforcer ou maintenir un ouvrage de maçonnerie ou de charpente ; aussi les compartiments de fer dans lesquels les panneaux des vitraux sont enchâssés. Pendant la période romane, le fer était peu employé dans les constructions ; on ne pouvait le forger que par petites pièces, les moyens mécaniques faisant défaut. Pour résister à la poussée des voûtes, pour relier des murs, on noyait des pièces de bois dans l’épaisseur des maçonneries, maintenues entre elles par des broches de fer ; mais c’était là des Chaînages (voy. ce mot) plutôt que des armatures proprement dites. Lorsque, par suite de l’adoption du système de construction ogivale, l’architecture devint à la fois plus légère et plus compliquée, lorsque les édifices durent prendre une grande étendue, le fer fut appelé à jouer un rôle assez important dans l’art de bâtir, et dès la fin du XIIe siècle déjà, dans le nord de la France, on crut devoir l’employer en grande quantité pour relier et donner du nerf aux maçonneries. L’emploi de cette matière, dont alors on connaissait peu les fâcheux effets, hâta souvent la ruine des monuments au lieu de la prévenir (voy. Chaînage, Crampon). Pour la charpente le fer ne fut employé que fort tard, et pendant toute la période ogivale on n’en fit point usage (voy. Charpente) ; Les charpentiers du moyen âge jusqu’à la fin du XVIe siècle ne cherchèrent d’autres combinaisons que celles données par un judicieux emploi du bois, sans le secours des ferrements. Toutes les grandes

  1. Hist. de l’abb. de Saint-Denys en France, par F. J. Doublet, religieux de ladite abbaye, liv. IV, p. 1197.