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[menuiserie]
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excessive richesse et leur combinaison compliquée ; mais lorsque l’on examine attentivement la structure de ces ouvrages, on s’aperçoit bientôt que cette structure ne concorde nullement avec l’apparence.


La légèreté n’est qu’extérieure, la construction est des plus grossières ; ce sont, par exemple, — ainsi que cela se voit dans la menuiserie arabe de l’Espagne, — des placages de moulures coupées d’onglet et clouées sur des fonds de madriers rangés à côté les uns des autres plutôt qu’assemblés ; ce sont des collages de bois découpés, rapportés les uns sur les autres, suivant un charmant dessin, mais sans que cette décoration s’accorde en rien avec la structure vraie ; ce sont encore, — ainsi qu’on peut l’observer dans certaines œuvres de menuiserie de l’Italie et même de l’Allemagne du moyen âge, — de véritables billes de bois réunies par des prisonniers, à travers lesquelles passent des moulures, des bas-reliefs, des ornements, coupés en pleine masse comme dans un bloc de marbre. Les moulures sont taillées à contre-fil, les joints tombent au milieu d’un relief, peu importe. Entre l’emploi de la matière et la façon de la décorer, il n’y a nulle harmonie, nulle entente ; le menuisier et l’artiste sont deux hommes qui travaillent l’un après l’autre séparément. Le menuisier n’est qu’un assembleur de blocs ; l’artiste, qu’un sculpteur ne se préoccupant pas de la nature de la matière qu’on lui fournit. À coup sûr, ces œuvres peuvent