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criquet

Comment lui expliquer tout cela sans l’agacer ? Comment, sans s’exposer à ses railleries, lui faire comprendre que son abandon la peine ?

Criquet tourne, retourne son stylographe, le mordille, le passe dans ses cheveux, s’en gratte l’oreille : puis, s’apercevant qu’elle est de nouveau toute barbouillée d’encre, s’exclame à demi-voix, s’indigne, s’emporte en menaces contre le malheureux instrument et se sèche enfin à petits coups de buvard.

Mais on entend un trot pesant dans le couloir ; quelqu’un approche, trébuche, se rattrape avec un cri rauque, ouvre la porte bruyamment.

Madame Dayrolles s’est soulevée sur ses coussins, M. Dayrolles s’éveille en grognant et tante Éléonore, debout dans l’embrasure, son lorgnon de travers sur son visage rouge et suant, s’écrie, tragique :

— Ah ! j’ai encore déchiré mon jupon !

Elle relève sa robe sur ses vastes mollets, autour desquels tirebouchonnent des bas de coton blanc, — des bas de son trousseau, d’une qualité extra-solide — et montre d’un geste de mélodrame un pan de volant décousu.

Mais comme tante Éléonore s’obstine à finir, sous forme de jupon, les robes de soie noire qu’elle a déjà usées jusqu’à la corde, l’accident se reproduit si fréquemment qu’il n’est plus possible de s’en émouvoir.

— Un jupon que je viens de terminer ! continue-t-