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criquet

Elle riait et essayait de le faire rire tout en promenant son mouchoir sur les yeux gonflés, et de temps à autre elle l’embrassait légèrement, gentiment, sur le front, sur les joues, dans le cou, de même qu’elle aurait embrassé un tout petit, en le dorlotant pour le consoler.

Jacques se laissait faire, la tête renversée, les yeux clos avec, par instants, un soupir convulsif. Ses lèvres s’entr’ouvraient sur ses dents et les poils de sa minuscule moustache blonde luisaient autour de sa bouche.

— Ça va mieux, dis ? demanda-t-elle, satisfaite, en lui caressant la nuque de ses doigts légers.

Une lueur rose courut sur le front du jeune homme, un rayon coula entre ses cils fermés, il saisit la petite main brune de Criquet, la parcourut de baisers qui montaient le long du bras, puis, tout à coup, enlaçant la taille libre, il l’étreignit avec violence et posa ses lèvres sur tout ce qu’il put atteindre du menu visage incliné.

Criquet se dégagea brusquement, bondit sur ses pieds, renvoya ses mèches en arrière et, se frottant longuement la bouche avec son mouchoir, elle dit, mi-rieuse, mi-fâchée :

— Qu’est-ce qui te prend, mon vieux ? Je ne suis pas Suzanne… Et mes mains, tu sais, elles ne sont guère propres…

Jacques s’était assis, la tête appuyée contre le tronc d’un pin ; il passa la main sur ses paupières, les leva,