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Page:Viollis - Criquet, 1913.djvu/125

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criquet

Elle traversa le hameau dont les murs éclatants s’éteignaient tandis que montaient les parfums du soir, et, grimpant l’escalier, se précipita sur une porte qu’elle ouvrit toute grande.

La chambre, — la plus élégante de la vieille maison —, avec ses meubles ripolinés de blanc, la lumière discrète de ses stores blonds, son odeur de lavande et de verveine, exhalait un calme si délicat que Camille demeura interdite sur le seuil. En jupon neigeux, le cou et les bras nus, les cheveux lustrés, le sourire assuré, comme Suzanne semblait lointaine, inaccessible ! Elle avait jeté un cri d’effroi, oh ! très léger, et qui n’avait point altéré le pur contour de ses joues :

— D’où sors-tu, Criquet ? Quelle tournure !

Criquet se vit dans la glace : haletante, le visage écarlate, suant, souillé de poussière, les cheveux en désordre, les vêtements froissés, elle était bien le messager du désespoir ; elle en conçut un secret orgueil.

— Veux-tu un peu d’eau de Cologne ? continua Suzanne.

— Non, répondit-elle d’un ton rogue.

Et elle leva les épaules.

Il s’agissait vraiment d’eau de Cologne !

— Qu’est-ce qu’il te faut, alors ?

Criquet hésita un instant ; elle cherchait des mots persuasifs, dramatiques ; ils s’enfuyaient devant cet