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criquet

ou : « Je suis enrhumée ». Elle éprouvait même quelque mépris pour les fillettes trop bouclées, au visage de sucre rose, dont on dit : « Quel amour ! »

Et honteuse de ce sentiment nouveau :

« Est-ce que je vais devenir aussi ridicule que les autres ? » songe-t-elle avec humeur.

Le pianiste a disparu derrière son mur laqué de noir ; on entend les premières mesures d’une valse et un remous agite aussitôt les danseurs. Trois d’entre eux se précipitent ensemble et s’inclinent vers Jeanne. Michel en est. Jeanne se lève, le visage éclairé de triomphe ; elle pose son éventail au coin de sa bouche, et regardant les trois jeunes gens l’un après l’autre, d’un air impertinent et perplexe :

— Je ne peux pourtant pas danser avec trois cavaliers, minaude-t-elle.

Elle avance à pas légers en se balançant un peu, tandis que, toujours inclinés, ils la précèdent à reculons. Elle trouve cela très drôle, elle rit, la tête rejetée en arrière, les yeux brillants, et deux fossettes se creusent dans ses joues grasses.

« Comme elle est mince et souple ! pense Camille. Moi aussi, je serais mince sans cette bande de toile… »

Et du doigt, elle touche à travers la robe sa cuirasse épaisse.

— Avec moi, mademoiselle Jeanne, dansez avec moi ! crie Michel dont la voix s’enroue. Il y a deux