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criquet

amoureux… Il fait froid, le banc est mouillé, il va pleuvoir, mais ils s’en moquent parce qu’ils s’aiment ; ils ne voient rien parce qu’ils s’embrassent.

— Drôle de bonheur ! fit Criquet, en se raidissant.

— Tu ne comprends donc pas ? continua-t-il en l’étreignant plus fort. Toi et moi, comme nous sommes là, tout seuls, bien serrés, si tu le voulais, nous irions au bout du monde ! Pourquoi t’écarter ? Tu ne m’aimes donc plus, Camille ?

Le bras impérieux lui faisait une ceinture brûlante ; elle avait l’impression d’être prisonnière, irritée d’un émoi qu’elle ne partageait pas, et s’efforçait d’éloigner son corps. Que répondre ? Après l’avoir négligée si longtemps, voulait-il, dès le premier jour où son caprice parlait, la forcer à s’engager ? L’amour, déjà ? Oh ! non, pas encore.

— Tu m’aimais autrefois, Camille, insistait la voix suppliante. Que t’ai-je fait pour que tu ne m’aimes plus ?

Eh oui, elle l’avait aimé de tout son cœur d’enfant. Mais était-ce l’amour ? Ce qu’il lui avait fait ? S’en était-il même douté ? Alors, à quoi bon le lui reprocher aujourd’hui ?

L’aimerait-elle de nouveau plus tard ? Qui sait ? Peut-être oui, peut-être non. Un trouble grandissant se mêlait à l’irritation de Camille. Elle ne trouvait plus rien à dire, un seul désir persistait : échapper à l’étreinte de ce bras dont la chaleur étrange pénétrait