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criquet

clos, s’assoupit en humant doucement le soleil entre ses dents branlantes.

Camille revenait, pensive, vers la maison quand des appels aigus la firent tressaillir : ses deux frères, dans leurs maillots de laine rouge, arrivaient en bondissant.

— Oh ! Criquet, Criquet, il y a si longtemps qu’on te cherche ! cria l’un, tout essoufflé.

— Oui ajouta l’autre, parce que, tu sais, il y en a des bourdons le long du grand mur, là-bas ! Tout l’air en est plein…

— Et on a retrouvé la grosse cloche en verre de l’an dernier, où on les mettait…

— Tu te souviens ? Et Marie, à la cuisine, nous a donné des bouteilles pour les attraper ; et, en attendant, on a mangé des groseilles, beaucoup ! sans qu’on nous voie !

Ils tournoyaient et sautaient, haletants : leurs boucles dansaient autour de leurs visages d’un rose moite, les mots fusaient, clairs et pressés, de leurs lèvres barbouillées de jus rouge. Camille les examinait comme elle avait examiné miss Winnie, puis la mère Sainte, avec la même attention sérieuse. Il lui semblait les voir pour la première fois. Qu’ils étaient gais, vivaces, sans souci ! Ils ne trouvaient pas le soleil brûlant ni la vie lourde. Ils se moquaient bien de l’avenir !

L’avenir ? Ne serait-il pas ce qu’ils voudraient ? Ils