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criquet

de juillet, aussi chaud en ce coin de Vendée que le soleil du Midi. Dans les plates-bandes ourlées de buis s’alignaient en files serrées les résédas aux pointes rousses, les flaques veloutées des héliotropes, les têtes finement ciselées des capucines dressées sur leurs feuilles rondes, les touffes couleur poussière de la lavande, les branches vert pâle de la verveine, les plants cotonneux de la menthe, toutes ces fleurs des anciens jardins qui ont des parfums de vanille ou de poivre. L’air odorant semblait le souffle même de leurs corolles vibrantes ; des guêpes, des mouches, des abeilles passaient de l’une à l’autre, frémissantes et grisées.

Criquet oublie sa peine ; une fiole au large goulot dans la main, elle guette les bourdons : il y en a de gros à la voix nasillarde, vêtus de noir et de blanc, solennels comme des juges ; il y en a qui ont le ventre rouge, le fifre aigu, l’allure insolente des soudards ; d’autres sont menus et bleus entre leurs ailes de gaze, d’autres encore spirituels et gamins avec leurs antennes de velours et leurs blonds corselets de pages.

Ils tournent au-dessus d’une plante, hésitent, puis s’abattent, les pattes repliées. Souvent ils effleurent tout juste la corolle en y plongeant leur trompe noire, recourbée comme un bec ; d’autres fois, ils se gorgent longuement, la tête en bas, les ailes agitées de menus frissons, reprenant haleine, avec de petits susurrements de bonheur ; parfois enfin, ils dispa-