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Page:Viollis - Le secret de la reine Christine, 1944.djvu/137

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XVII


Éclairée par des pages qui portaient des torches, la lente cavalcade ondulait sur la route comme un serpent de feu.

Après l’éclatante journée, la nuit était sombre. Une fine pluie tombait avec mélancolie.

Christine marchait en tête du cortège, sur un cheval andalou, plus noir que la nuit, qu’elle avait peine à maîtriser pour lui faire garder le pas. Elle était coiffée d’un chapeau de feutre à plumes rouges, enveloppée dans un grand manteau, cachant la robe blanche qu’elle n’avait pas eu le temps de changer. Autour de son cou et de celui d’Ebba, elle venait d’attacher, avant le départ, une médaille représentant un labyrinthe et portant en exergue la date de son abdication et ce vers de Virgile : « Que le destin nous montre notre route ».

Se rendait-elle enfin compte de ce défi au destin qu’était cette abdication ? De l’irréparable qu’elle venait de consommer ? Elle entrait dans le labyrinthe. Comment et quand en sortirait-elle ?

À ses côtés, le nouveau roi, le vieux Per Brahe et quelques conseillers d’État, derrière elle sa fidèle Ebba, ses dames d’honneur, sa nourrice, ses cousines puis tous les chevaliers de la Cour respectaient et imitaient son silence que troublait seul le pas rythmé des chevaux.

— Ne dirait-on pas un cortège de funérailles ? murmura un page.

On arrivait au bac qui allait transporter Christine et sa suite de l’autre côté de la rivière, non loin du château du comte de Dohna où elle devait passer la nuit.