Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/121

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seuil même de nos portes, la masse énorme s’arrêta : quatre fois ses antres retentirent du cliquetis des armes. Cependant, ô délire ! nous en pressons la marche ; et poussés d’un aveugle transport, nous plaçons le monstre sinistre sous les lambris de l’Immortelle. Alors même Cassandre, élevant sa voix fatidique, nous prédit nos malheurs ; mais hélas ! un dieu nous rendait sourds à la voix de Cassandre. Et nous, infortunés, nous dont luisait le jour suprême, nous en faisons un jour de fête, nous courons parer nos temples de verdure et de fleurs !

Enfin le soleil a décrit son tour ; et la nuit s’élançant des gouffres humides, enveloppe de son crêpe immense et le ciel, et la terre, et les complots des Dolopes. Les Troyens, sous leurs toits paisibles, s’abandonnent au repos : tout dort, et dans Pergame règne un calme profond. Mais déjà les nefs de Mycènes s’avançaient de Ténédos dans leur menaçant appareil, et voguaient à la faveur du silence et des ombres, vers un rivage, hélas ! trop connu. Un fanal, arboré sur la poupe royale, a fait briller ses feux. À l’instant Sinon, que le ciel irrité protégeait pour notre ruine, rompt furtivement la barrière qui retenait les Grecs, et les délivre de leur sombre prison. Le repaire s’ouvre, et les rend à la lumière. De ces voûtes caverneuses se précipitent avec une joie barbare et Thessandre et Sthénélus, et l’exécrable Ulysse, en glissant le long d’un câble officieux. Après eux, s’élancent Acamas et Thoas, et Pyrrhus, bouillant fils d’Achille, et Machaon, et Ménélas, et l’inventeur du stratagème, le cruel Épéus. Les lâches fondent sur un peuple enseveli dans