Page:Virgile - Énéide, traduction Guerle, 1825, livres I-VI.djvu/203

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favorable. Je m’adresse au favori des dieux, et j’interroge sa prudence : « Honneur de la Phrygie, interprète des Immortels ! vous que Phébus inspire, et que ne trompèrent jamais ni les lauriers de Claros, ni les trépieds sacrés ; vous à qui les astres du ciel, et le langage des oiseaux, et leur vol prophétique, révèlent l’avenir ; sage Hélénus, éclairez-moi. Nombre d’heureux augures ont promis à mes longs voyages un terme fortuné ; tous les avis des dieux me conseillent de chercher l’Italie et ses plages étrangères. Céléno seule, la cruelle Céléno, nous menace d’un affreux prodige, nous annonce des jours de vengeance, une horrible famine. Quels dangers ai-je à fuir ? et comment triompher de tant d’épreuves renaissantes ? »

Hélénus, immolant alors les victimes accoutumées, implore la faveur céleste. Il dénoue les bandelettes qui ceignaient son front vénérable, me présente la main, et me conduit dans ton sanctuaire, ô puissant Apollon ! Là, tandis que mon âme émue frémit d’un saint effroi, le roi-pontife laisse éclater en ces mots les accens de sa voix divine :

« Fils de Vénus, n’en doute pas, tu sillonnes les ondes sous les auspices du ciel même : ainsi le maître du monde veille sur tes destinées : ainsi le sort en a réglé le cours, et ses décrets sont immuables. Pour que tes nefs puissent parcourir avec moins de péril des parages inconnus, et te conduire enfin dans les ports de l’Ausonie, écoute les secrets qu’il m’est permis de te dévoiler ; les Parques dérobent le reste au